Progrès en inforensique, pas en droit

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L’inforensique ou recherche de la preuve scientifique informatique poursuit son développement. Son intérêt principal est de réduire (voire annihiler ?) le principe d’inattribution qui continue de régner dans le cyberespace. Voyons-en quelques développements récents.

Conjecture préalable : le principe d’inattribution est valable dans tout le cyberespace sauf dans l’Empire qui sait identifier sans problèmes les attaquants chinois et nord-coréens. Pour ceux originaires d’autres pays du monde, cela semble un peu plus difficile, mais ce n’est qu’une question de temps.

Deux points méritent que nous nous y arrêtions : la prise d’empreinte digitale à distance et la discrimination vocale dans le brouhaha.

La prise d’empreinte digitale à distance et sa reconstitution est un sujet d’actualité. La presse s’en fait l’écho, tant en France qu’à l’étranger. En soi, rien de terriblement neuf. Je me souviens en 2009 avoir assisté à la démonstration suivante : une personne mettait un « gant » en silicone reproduisant les empreintes digitales d’une tierce personne et leurrait ainsi le capteur de sécurité biométrique. La technique a évolué, car à cette époque, il fallait pouvoir relever les empreintes digitales sur un support avant de les copier. Maintenant, une simple photo suffit.
Ce qui soulève au passage quelques questions juridiques :

  • l’empreinte digitale est-elle une donnée personnelle ?
  • Puisqu’à partir d’une photo je peux reconstituer les empreintes digitales, prendre la photo d’une main sera-t-il considéré comme un vol de donnée personnelle ?
  • L’utilisation d’une contrefaçon d’empreinte digitale sera-t-elle considérée comme une usurpation d’identité, ce qui pose de nouveau la question de l’identité, plus particulièrement l’identité dite numérique.

La discrimination vocale à distance se développe, une vidéo le montre. Comme l’explique un article de presse, cette trouvaille permettra de récupérer des informations stratégiques. Mais pas seulement. A la vidéo surveillance allons-nous bientôt voir s’ajouter l’audio surveillance permanente ? Ce qui posera quasiment les mêmes questions que celles énoncées supra :

  • si une personne n’est pas placée juridiquement ou administrativement sur écoutes sa voix peut-elle être néanmoins discriminée parce qu’elle est suspectée d’avoir adressé la parole à une personne écoutée ?
  • les conversations privées sur la voie publique seront-elles considérées comme personnelles ou publiques ?

Dans un précédent billet, je souhaitais un développement de l’inforensique. Nuançons ce souhait. Si le droit n’accompagne pas ces développements, nous serons dans des situations inconfortables, le risque étant de voir légaliser la pratique, même si elle est abusive, comme c’est déjà souvent le cas.
Allons-nous, là aussi, confirmer le constat de Marguerite Yourcenar dans Archives du nord :

L’homme a fait de tout temps quelque bien et beaucoup de mal ; les moyens d’action mécaniques et chimiques qu’il s’est récemment donnés, et la progression quasi-géométrique de leurs effets ont rendu ce mal irréversible.

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