Confiance, État, industriels et loi

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La confiance est un sujet récurrent dès lors qu’on parle de cyber (et encore plus depuis qu’on parle de numérique), tout comme la sécurité, l’éthique, la vie privée, etc.

J’ai déjà publié à ce sujet différents billets, mais il semble utile d’y revenir encore une fois, tant les mots voient leur sens perverti.

D’un autre côté, cette perversion du sens des mots montre la duplicité de celui qui les emploie, ou alors sa méconnaissance du vocabulaire français. Mais il est vrai que la langue française manque de nuances, de clarté, de sens de la mesure, alors que d’autres lui sont bien supérieures. C’est certain. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle a la réputation d’être difficile à apprendre pour les étrangers, parce qu’elle n’est qu’approximative…

La confiance ou la peur | Le blog de l’Efficacité ...

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Développons, si vous le voulez bien.

Dans un premier billet, je posais la différence entre confiance et transparence Mouvement volontaire, la confiance ne peut être confondue avec la transparence, car la transparence est une contrainte, c’est-à-dire quelque chose qu’on m’impose et qu’elle ne pouvait s’accorder qu’à des personnes.

Dans le deuxième billet, j’affirmais qu’on pouvait, avant de faire confiance à quelqu’un, s’assurer qu’on pouvait compter sur lui, puis qu’il était une personne de parole. Rien n’empêche d’accorder sa confiance immédiatement, mais elle peut aussi se construire avec le temps. Ce lien de la confiance avec le temps est important, ne serait-ce que parce qu’on dit que la confiance se construit au millimètre et se détruit au kilomètre. Et nous touchons ici du doigt un problème de la confiance dans le cyberespacenumérique : le rapport avec le temps. Dans un environnement où tout est fait dans une ambiance de contre-la-montre (avec profusion de chocapics survitaminés le matin), reste-t-il encore du temps pour bâtir la confiance ?

Enfin, dans un troisième billet, je mentionnais la nécessaire réciprocité dans l’instauration de la confiance : Lors de « l’établissement » de la confiance entre deux personnes, il existe une réciprocité de la confiance, et donc un engagement mutuel à ne pas se trahir. De ce fait, le lien de confiance fait des deux personnes liées des égales. L’une ne peut s’estimer supérieure en tout à l’autre, puisqu’elle lui accorde sa confiance.

Ayant récemment manifesté via touitteur ma désapprobation envers un touit qui mentionnait IA et confiance…tout un programme ! La loi peut elle instaurer la confiance ? j’ai été rappelé à l’ordre lorsque j’ai affirmé que la confiance se passait de lois et ne s’exerçait qu’entre personnes. Passons sur le détail des échanges et demandons nous si la loi peut instaurer la confiance ou, plus exactement, si la loi peut être partie dans le processus d’instauration et de maintien de la confiance.

Le droit ayant pour but de réguler les relations entre personnes, peut-il alors réguler la confiance entre elles ?

A priori, pourquoi pas. Et c’est ce vers quoi certains juristes semblent pousser.

Mais à bien y réfléchir, non, si la confiance provient d’un mouvement volontaire et que des « petits riens » me font accorder ou retirer ma confiance à quelqu’un.

Car si la loi me poussait à accorder ma confiance, serais-je libre de la retirer à une personne qui, selon moi, m’a trahi ? Ou alors me faudrait-il passer devant un juge qui statuerait si j’ai raison de retirer ma confiance ou si, au contraire, je suis contraint par la loi de continuer à l’accorder ? Saisit-on mieux ainsi l’absurdité de réguler la confiance par la loi ? Si tel est le phantasme de certains juristes, quel serait l’étape suivante ? Réguler l’amitié, l’amour ? Remarquons que cela procéderait de la même absurdité.

Bref, tout cela pousse à croire que, comme les termes vie privée, éthique et sécurité, celui de confiance est utilisé dans un sens qui n’est plus le sien. Les apparences demeurent, mais la substance est profondément modifiée. De même que certaines personnes se réclament « non binaires » (au passage, je suis curieux de savoir comment les hôpitaux, et notamment les chirurgiens les considéreraient), le vocabulaire semble devenir, pour certains, non binaire : il y avait le sens et le contre-sens, y aurait-il maintenant… l’alter-sens ?

Comment sortir de cette apparente aporie et ménager à notre État et nos industriels une porte de sortie honorable ? En remettant à l’honneur le terme de sûreté. De quoi s’agit-il ? Pour le Larousse, elle se définit ainsi : Caractère précis, efficace de quelqu’un ou de quelque chose, sur lequel on peut compter d’une façon certaine : Mémoire d’une sûreté absolue. Voilà une solution à notre problème ! Reconnaissons que cela est moins séduisant que de parler d’industries de confiance, de tiers de confiance (au passage personne ne semble s’être rendu compte que se faire qualifier de tiers de confiance revenait à accorder une confiance diminuée…), mais bien plus juste en terme de sémantique. Mais cela soulève un autre problème : faut-il vraiment privilégier la vérité, ou le marketing ? Soljenitsyne écrivit, dans Révolution et mensonge : la violence ne peut s’abriter derrière rien d’autre que le mensonge, et le mensonge ne peut se maintenir que par la violence. Le choix est posé, il faut maintenant se décider.

Tout ceci nous pousse à conclure à la manière de : « Alors il faut prendre les choses comme elles sont. Car on ne fait pas de cyber / numérique autrement que sur des réalités. Bien entendu, on peut sauter sur sa chaise comme un cabri en disant la confiance, la confiance, la confiance, mais ça n’aboutit à rien. Et ça ne signifie rien. Je répète, il faut prendre les choses comme elles sont. »

Avec, en bonus, le lien ici.

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